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Négocier les salaires dans l’entreprise : une pratique courante mais souvent informelle

On négocie d'autant plus sur les salaires que l'entreprise est grande. Au-delà de l'effet des seuils légaux, c'est l'implantation syndicale qui s'impose comme le principal déterminant de la propension à négocier.

Mesurée par l'enquête Reponse en 1998, la négociation des salaires en entreprise revêt une tout autre ampleur que celle retracée par les bilans établis par l'administration du travail : elle aurait en effet concerné près de 60 000 établissements et 6 millions de salariés, à mettre en regard des 2 millions couverts pas les accords salariaux dûment enregistrés. L'écart vient de ce que la négociation s'éloigne dans la pratique des procédures légales: ceux qui négocient pour le personnel sont souvent des élus, voire des salariés sans mandat particulier, plutôt que des délégués syndicaux comme la loi le prescrit. En outre, la discussion ne débouche pas toujours, loin s'en faut, sur un accord en bonne et due forme. Il reste que ce résultat témoigne de relations professionnelles plus nourries que ce qu'en laisse voir le seul décompte des accords dûment déposés auprès de l'administration.

On négocie d'autant plus sur les salaires que l'entreprise est grande. Au-delà de l'effet des seuils légaux, c'est l'implantation syndicale qui s'impose comme le principal déterminant de la propension à négocier. L'histoire des relations sociales dans l'entreprise joue aussi son rôle: négociation et accord s'inscrivent souvent dans la continuité de pratiques de discussion, formelles ou informelles, qui n'excluent pas le conflit ouvert. La fonction occupée par le négociateur patronal, comme les objectifs qu'il se fixe, ont également un rôle explicatif.

Mais négocier n'est pas signer : la négociation n'aboutit à un accord que deux fois sur trois. Et si les mêmes facteurs sont à l'œuvre, ils ne jouent pas toujours dans le même sens que lorsqu'il s'agit d'ouvrir la discussion : l'accord est par exemple plus facile dans les petites unités.

Enfin les parties ne sont pas toujours d'accord sur les effets de l'accord. Les dirigeants se montrent souvent sceptiques quant à l'impact réel de la négociation, même quand elle s'est conclue par un accord. Ce n'est pas l'avis des représentants salariés, pour qui elle a le plus souvent fait bouger la direction.