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Les relations sociales en entreprise durant la crise sanitaire

Les représentants du personnel souvent consultés, les salariés modérément associés

En 2020, pour faire face à la crise, 92 % des entreprises de 10 salariés ou plus du secteur privé non agricole ont pris des mesures de prévention sanitaire et 78 % des mesures relatives à l’activité partielle

Le télétravail et l’aménagement des horaires de travail ont été adoptés par respectivement 56 % et 54 % des entreprises.

Lorsqu’elles étaient présentes, les instances représentatives du personnel ont été consultées par 74 % des entreprises. Les salariés ont également été associés dans 37 % des cas. Ces mesures ont suscité des tensions et des conflits entre la direction et des salariés dans seulement 4 % des entreprises, aux dires de ces dernières.

Un recours à des mesures de gestion de crise dans la plupart des entreprises

En 2020, la plupart des entreprises de 10 salariés ou plus du secteur privé non agricole ont pris au moins une mesure d’adaptation pour faire face à la crise du Covid-191 . 92 % d’entre elles employant 96 % des salariés du champ ont adopté des mesures de prévention (distanciation, désinfection/nettoyage des locaux, masques, etc.) (tableau 1, encadré). 78 % des entreprises ont eu recours à des mesures de chômage partiel (ou activité partielle). La mise en place du télétravail a concerné plus d’une entreprise sur deux (56 %) mais cette part s’est accrue sensiblement avec la taille de l’entreprise. En 2020, peu d’accords collectifs d’entreprise portant sur le télétravail ont été conclus au plus fort de la crise sanitaire (390 au 1er trimestre et 420 au second) [1] ; sa mise en place a largement relevé de décisions informelles, prises dans l’urgence. L’adaptation des horaires ou la prise de congés ont été également mises en œuvre par 54 % des entreprises. Dans les entreprises employant moins de 50 salariés, cette mesure a été aussi fréquente que le recours au télétravail. Une ordonnance de mars 2020 a permis, à titre provisoire, à l’employeur d’imposer la prise de congés payés, leur fractionnement ou leur suspension, sous condition d’accord collectif. Cela a engendré la signature de 3 590 accords et avenants conclus en lien direct avec la crise [1].

90 % des entreprises ont pris au moins deux mesures2 pour adapter leur fonctionnement à la situation sanitaire et économique. L’adoption de trois mesures a été le cas le plus fréquent (34 %, 30 % quatre mesures et 24 % deux).

1 Le questionnaire de l’enquête suggère quatre mesures principales : la prévention sanitaire ; l’adaptation des horaires de travail et l’aménagement des prises de congés ; le télétravail ; le chômage partiel. D’autres mesures ont été citées telles que la protection des personnes vulnérables, les gardes d’enfants ou la prime exceptionnelle dite « prime Covid ». Ces réponses libres ne représentent que 2 % des entreprises du champ, employant 7 % des salariés. Les mesures non suggérées peuvent de ce fait être un peu sous-estimées.

2 Deux mesures parmi celles suggérées dans l’enquête ou autres.

Des mesures largement accompagnées d’une consultation des instances représentatives du personnel

Les entreprises pourvues d’une instance représentative du personnel (IRP) représentent 44 % des entreprises du champ [2].

TABLEAU 1 | Les mesures prises par les entreprises pour faire face à la crise (en %)

*Les mesures présentées dans le tableau correspondent à celles suggérées dans le questionnaire de l’enquête Acemo DSE.
Lecture : 92,4 % des entreprises ont adopté des mesures de prévention pour s’adapter à la crise du Covid-19, elles emploient 96,3 % des salariés du champ.
Champ : entreprises de 10 salariés ou plus du secteur privé non agricole en France (hors Mayotte).
Source : Dares, enquête Acemo « Dialogue social en entreprise ».

Parmi ces dernières, 74 % de celles ayant pris au moins une mesure d’adaptation, ont engagé une consultation des IRP, représentant 90 % des salariés (graphique 1-a). Plus les entreprises sont grandes, plus cette consultation a été fréquente : 95 % de celles de 500 salariés ou plus y ont eu recours, contre 66 % de celles comptant entre 10 à 49 salariés disposant d’une IRP. Ces petites structures ont des habitudes de négociation moins ancrées : seules 9,2 % d’entre elles ont mené au moins une négociation en 2020, contre la quasi-totalité de celles employant 500 salariés ou plus [3]. Parmi les entreprises ayant négocié et pris des mesures de lutte contre la crise, 88 % ont consulté leurs IRP, contre 23 % parmi celles n’ayant pas engagé de négociation : la pratique de négociation est allée de pair avec la consultation des IRP sur les mesures de gestion de crise. A contrario, 16 % des entreprises ont mis en place des mesures d’adaptation sans consulter leurs IRP, alors qu’elles en étaient dotées.

Les salariés plus souvent associés aux mesures en l’absence de négociation

Les salariés ont par ailleurs été associés (par référendum, questionnaire, boîte à idées, etc.) à la mise en place des mesures d’adaptation dans 37 % des entreprises (graphique 1-b). Cette consultation a été plus fréquente dans les petites structures, avec 39 % des entreprises employant entre 10 et 49 salariés concernées, qu’elles disposent ou non d’une IRP, contre 17 % de celles ayant 500 salariés ou plus. La consultation des salariés, en cas de mesures d’adaptation pour faire face à la crise, s’est avérée supérieure dans les entreprises n’ayant pas négocié en 2020 (38 %, contre 30 % des entreprises ayant négocié).

Par ailleurs, une faible minorité des entreprises ayant pris au moins une mesure en réaction à la crise disent que cela a suscité des tensions ou des conflits : 4 % des entreprises ont connu un conflit entre la direction et les salariés, 1 % entre la direction et les représentants du personnel.

GRAPHIQUE 1, a et b | La consultation lors de la mise en place de mesures d’adaptation à la crise sanitaire

1.a – des instances de représentation du personnel présentes
1.b - des salariés

Les résultats présentés sont issus de l’enquête sur le dialogue social en entreprise (DSE), qui fait partie du dispositif Acemo (activité et conditions d’emploi de la main-d’œuvre). Portant sur l’année 2020, elle a été réalisée courant 2021. Elle interroge un échantillon représentatif des 245 000 entreprises de 10 salariés ou plus du secteur privé non agricole en France (hors Mayotte), qui emploient environ 15,0 millions de salariés. Les résultats présentés ici proviennent des 11 349 questionnaires exploitables reçus.

L’enquête, réalisée depuis 2006, permet un suivi annuel des relations professionnelles au niveau de l’entreprise définie comme unité légale et identifiée par un seul numéro Siren. Cette édition contient un volet spécifique sur les relations sociales durant la crise sanitaire.